LES CAILLOUX DU PETIT POUCET
Le petit Poucet, ce conte de Charles Perrault, est bien connu. Cet enfant minuscule était pourvu de la même astuce que son successeur dans le domaine de la ruse et de l’intelligence : Astérix, le petit gaulois. Si l’un possédait une potion magique qui rend invincible l’autre détenait les bottes de sept lieux qu’il avait chapardé à un ogre à l’occasion de sa sieste assourdissante. C’est ainsi que Tom Pouce devint insaisissable par la vélocité de ses déplacements.
Pas plus grand que le pouce de mon index - disait ma concierge - il s’installait béatement dans l’oreille d’un cheval. Voilà une bizarrerie peu commune qui met la puce à l’oreille si je puis dire !
Comment mieux dire que notre minuscule chafouin entendait le langage des chevaux ?
Ma concierge me confia un jour qu’elle aussi entendait hennir les chevaux. Je la rassurais de suite en lui confirmant que tout un chacun pouvait entendre le hennissement de ces braves bêtes. C’est ainsi que je la soulageais d’un poids car elle avait peur d’être pourvue de clairaudience.
La langue des chevaux ou cabale est une manière de s’exprimer qui exclut tout langage vernaculaire – le français ou l’espagnol par exemple - ou véhiculaire – tel l’anglais qui est universel. De ce fait elle flirte avec la phonétique, l’anagramme, l’inversion et les racines grecques ou latines. Ceci étant dit fermons la parenthèse que nous avons oublié d’ouvrir.
Non ne me reprochez pas de ne pas avoir parlé de langue des oiseaux ces messagers des dieux. Contentons-nous de les écouter chanter.
Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Un jour Tom Pouce et ses six frères furent égarés dans la forêt par leurs parents qui ne pouvaient plus les nourrir car à cette époque reculée n’existait par l’IVG pour rétrécir les familles nombreuses.
Les parents ne voulant pas les voir mourir de faim décidèrent donc de les perdre dans la forêt. Et voilà notre famille nombreuse en partance pour son lieu de perdition. Mais le petit futé Tom Pouce avait prévu le coup et sema des cailloux sur le chemin. Quand les parents leur faussèrent compagnie sous le prétexte que le pipi ne devait pas attendre, tout la marmaille se mit à piailler en criant que les loups allaient les bouffer. Mais le rusé Tom Pouce eut tôt fait de les ramener à la maison en suivant la piste de ses petits cailloux blancs.
Ils furent accueillis dans la joie car un seigneur s’était souvenu qu’il devait payer à ses pauvres paysans des sacs de patates qu’il leur devait depuis belle lurette. Et ainsi ils purent faire bombance jusqu’à ce que leur bourse devienne désespérément plate. Et le même scénario se reproduisit. Papa et maman leur firent faire une balade dans la forêt pour s’en débarrasser. Mais cette fois l’histoire tourna au vinaigre car Tom Pouce n’ayant pu trouver de cailloux sema des mies de pain qui furent mangées par les oiseaux. Ce fut le moment où il fallut se débrouiller seul. C’est là que je voudrais en rester car l’hermétiste Charles Perrault lui donnait, à ce conte, un sens qui échappe aux enfant mais ne devrait pas être ignorée des papas et des mamans qui vienne le soir lire cette histoire avant que ne passe le marchand de sable.
Le mot clé de cette histoire est RETOUR. Certes nous pensons immédiatement à un simple retour à la maison après s’être perdu. Mais ce terme dissimule tout autre chose. Dans sa traduction de l’Evangile de Mathieu André Chouraqui interprète le terme grec Métanoïa par Retour. Retour à sa véritable humanité qui est bien loin d’être ce que nous croyons. Le seul fait que nous soyons imbus de nous-même – d’une manière plus où moins subtile – menteurs envers nous-même ou épouvanté par la mort montre combien nous ne sommes pas des hommes et des femmes véritables que les asiatiques appellent tchen jen. Métanoïa – permettez que je vous épargne le terme grec – Est composé du préfixe « méta » que l’on trouve dans métamorphose et qui signifie changement. Quant à « noïa » que l’on trouve dans paranoïa il signifie pensée. En bref métanoïa est le changement d’une manière de penser qui est un retour à l’homme véritable que nous étions. C’est pour cette raison que certains l’appellent réintégration.
Actuellement beaucoup d’individus cherchent d’une manière ou d’une autre ce retour. La chrétienté fut, en occident, leur premier refuge. Mais cette religion révélée les gènes de plus en plus car trop contraignante avec ses dogmes et ses mystères qu’il est interdit de chercher à comprendre. De ce fait nombreux sont ceux qui se tournent vers le bouddhisme.
Avant toutes choses il est important de se souvenir que ni le Christ ni Bouddha ne créèrent une religion. Ils n’ont rien écrit en ce sens. Tout deux prêchaient pour la transformation des êtres et non pour créer des lois ou dogmes. Ce sont les faibles souvent intellectuels ou bavard qui transformèrent les messages christiques et bouddhique en religion car il est inévitable que la médiocrité ne vienne avilir le message initial. C’est ainsi que vont les choses.
Alors, comment découvrir le chemin du retour ?
Il ne peut que passer que par la mystique universelle qu’elle vienne d’occident ou d’orient. Le challenge c’est de la trouver. Dans le christianisme elle semble évaporée. Dans le Bouddhisme c’est différent.
Mais retenons une puissante convergence entre l’éveil prôné par Bouddha et celui demandé par le Christ lors de la transfiguration. Pour les chrétiens ce n’est qu’un épisode de la divinité du Christ pour Bouddha c’est un épanouissement de l’être vers l’universel. Les chrétiens oublient toujours que le Christ leur a dit que l’homme pouvait faire les mêmes choses que lui. J’entends d’ici ergoter les théologiens outrés. Heureusement, ma concierge m’a prévenue que c’est une espèce en voie d’extinction. Evidemment cette brave dame exagère car le gargarisme n’est pas prêt à passer de mode…
Le bouddhisme religieux, on parle comme étant un grand véhicule, ce qui laissa perplexe ma concierge laquelle essayait de comprendre s’il s’agissait d’un bus ou d’un poids lourd. Je l’éclairai en lui disant qu’il s’agissait de la traduction d’un mot oriental bizarre pour nous : Mahayana. C’est un courant religieux représenté par son « pape » le Dalaï-Lama, et son dogme assez contraignant : il FAUT CROIRE à la réincarnation. Evidemment, si cette religion est beaucoup moins saumâtre que le catholicisme ou le protestantisme elle ne saurait conduire au retour et à l’éveil. Car l’éveil ne peut se réaliser que sous le signe de la plus totale liberté.
Le bouddhisme philosophique a fort heureusement survécu et prônait que sous une forme extrêmement subtile de méditation, de trouver, dès notre vie ACTUELLE, une sérénité devant ÉTERNELLEMENT DURER.
C’est cela le retour, la métanoïa de la Bible. Pour y parvenir il faut être petit comme Tom Pouce ! En d’autres termes l’ego doit trouver sa véritable place, et non être détruit comme certains l’affirment.
Évidement ce retour est la résultante d’exercices qui transforment progressivement notre manière de percevoir et de penser. ÊTRE dans la totalité de L’ÊTRE n’est pas une formule littéraire. En cela les leçons de Carlo Castanéda sont des plus enrichissantes.
Je me barbe à vous raconter des trucs sérieux. Restez rabelaisien mes frères et partageons le nectar de la dive bouteille.
Avec toute mon amitié.