Dans mon article sur l’épée flamboyante tenue par un Chérubin, L’ÉPÉE FLAMBOYANTE des Francs-Maçons j’ai déjà abordé cette question, mais d’une manière très succincte. Il m’a semblé opportun d’étoffer un peu ce texte car il éveille l’intérêt de plusieurs dizaines de lecteurs.
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n lit dans la Genèse de la Bible, au 24e verset du troisième chapitre que :
« Le Seigneur Dieu mit des Chérubins dans le jardin d’Eden, qui faisaient étinceler une épée de feu, pour garder le chemin qui conduisait à l’Arbre de Vie »
Jules Boucher dans La symbolique Maçonnique (p 60 édit. 1948) nous dit :
« Les « Chérubins » forment une classe d’Anges… »
Voilà une affirmation qui nécessite quelques bémols. En effet, il est nécessaire d’apporter à cette définition un amendement puisque les Chérubins ne sont pas QUE des Anges, pas plus que les Séraphins ou les Archanges !
Pour faire une analogie, c’est comme si nous disions qu’un expert-comptable est seulement comptable, ce qui est une erreur.
Le mot Ange n’est pas un terme générique qui désigne, par un nom particulier, des entités différentes.
Anges est un nom spécifique qui définit une catégorie d’être célestes bien précises qui signifient envoyé, messagers, fils de la vie. En d’autres termes, les Chérubins ne sont pas des anges, même s’ils en ont les qualités, (comme un expert-comptable est aussi comptable). Et Deny l’Aréopagite précise :
« Le nom d’ange convient proprement au dernier rang de la hiérarchie ».
Sur le plan spirituel les Chérubins sont supérieurs aux Anges et jouent un rôle différent. Ils constituent donc une catégorie d’êtres formant, avec d’autres catégories, ce que l’on appelle la hiérarchie céleste.
C’est le Pseudo-Denys l’Aréopagite (vers 490) qui en donna dans son ouvrage Le livre des hiérarchies célestes, la nomenclature en neuf hiérarchies :
1– Séraphins.
2– Chérubins.
3 – Les trônes.
4 – Les Dominations.
5 – Les Vertus.
6 – Les Puissances.
7 – Les Principautés.
8 – Les Archanges.
9 – Les Anges.
Les Chérubins sont, avec les Séraphins, les plus hautes entités célestes. À travers eux, Dieu rayonne d’une manière impersonnelle, universelle. Cette particularité justifie leur présence aux portes du jardin d’Eden, et aux portes de certains temples, en qualité de lieutenant de Dieu, ou pour employer le terme ecclésiastique, de vicaire de Dieu. Ils maintiennent l’architecture de l’univers car ils sont les esprits de l’harmonie, avec lequel l’alchimiste dialogue pour être en totale concordance avec les lois célestes et terrestres. Donc, quand un Franc-Maçon s’adresse au Grand Architecte de l’Univers ils est entendu d’abord par les architectes qui sont les Chérubins, lesquels tiennent l’épée flamboyante. Ces entités sont seules capables d’ouvrir les portes de l’Eden à ceux qui en sont dignes.
Nous voyons là l’importance capitale de l’épée flamboyante dans le rituel maçonnique. Deux chérubins, épée en main, devraient figurer (au moins en peinture murale) à l’extérieur du temple Maçonnique de part et d’autre de la porte d’entrée.
La présence des Chérubins plonge ses racines dans une tradition extrêmement ancienne sur le plan de la science initiatique mais aujourd’hui disparue ou mal assimilée qu’il convient d’essayer de mieux comprendre.
Une précision : Le Grand Architecte de l’univers est une émergence culturelle du christianisme, mais du christianisme réel. Il ne s’agit donc pas de doctrine ou de dogmes qui sont, d’ailleurs, contraires au concept initial de christianisme. Le fondement du christianisme repose sur un acte qui fut accompli par le Christ. Et cet acte est de nature telle qu’il n’exerce d’influence que sur celui qui prend la décision de le laisser agir sur lui. En d’autre terme nous avons la liberté de le recevoir ou non. D’agir ou non en harmonie avec le Grand Architecte de l’Univers. C’est tout ! Inutile de faire des commentaires théologiques, ou autres, aussi longs que les nuits polaires !
Dans la messe catholique, le prêtre et les fidèles remercient les hiérarchies célestes pour leur présence, qui en réalité ne peuvent s’absenter.
Le problème qui m’est personnel, c’est qu’au catéchisme on ne m’a pas expliqué ce qu’étaient ces hiérarchies. Mais on m’a demandé de prier mon ange gardien. Bref, des anges on en parle beaucoup dans la Bible, mais ce que l’on ne m’a pas dit c’est qu’ils constituent le pallier de la hiérarchie la plus proche des hommes. En d’autres termes les anges sont des êtres qui sont devant nous sur la route de la divinisation. Il a fallu que je trouve ça tout seul car mon brave curé ne m’en a jamais parlé. Il me demandait seulement de croire en eux. Aussi quand j’étais enfant ma maman me donnait pour Noël une pièce de monnaie pour la glisser dans une fente, prévue à cet effet, au pied d’un ange en carton-pâte peinturluré qui inclinait la tête pour me remercier. Il était à côté de la crèche et je me demandais ce qu’il faisait là dans cette merveilleuse odeur d’encens. Il m’amusait au point de vouloir vider le porte-monnaie de ma maman qui, hélas, ne voyait pas les choses sous le même angle ! Je lui souriais de bonheur à l’ange et quand ma maman me tira par la main avant que je la mette sur la paille, je vous assure que l’ange me souriait en me regardant partir sous l’inflexible houlette maternelle. De loin je lui ai dit au revoir avec mon bras libre, et il m’a répondu en inclinant la tête tout seul, sans l’aide d’une pièce de monnaie. C’est pour cela que l’ange est resté un souvenir merveilleux qui est prêt à surgir dans le monde visible.
L’ange est porteur de la sagesse et il peut l’inspirer aux hommes. Par l’activité de l’ange nous pouvons saisir l’intelligence cosmique dans le silence de notre pensée. Il a la capacité de s’incorporer à notre corps invisible dont j’ai parlé précédemment. Voir : LE CORPS INVISIBLE ET LA MÉDECINE ALCHIMIQUE . Il guide notre destin personnel. Voilà en gros ce que j’ai compris… mais pas au catéchisme !
L’Ange se tient immédiatement derrière l’homme. Pour voir l’ange, il faudrait en esprit « se retourner », c’est-à-dire se détourner de la ligne terrestre qui nous a été imposée à la naissance et sur laquelle nous avançons jusqu’à la mort. Le voir, serait donc en même temps découvrir le sens de notre destinée.
Je ne ferais pas l’injure aux Francs-Maçons de commenter une cérémonie où le retournement du récipiendaire a lieu pour se voir dans un miroir. Interpréter cela comme la découverte de soi en qualité de notre propre ennemi est une grave erreur, il faut en convenir.
Plus tard j’ai saisi que l’angéologie était une notion très ancienne, beaucoup plus ancienne que la Bible et qui structuraient d’une manière remarquable l’évolution des êtres.
La notion de hiérarchie nous dépasse et embarrasse l’Église. Au 11e, 12e, 13e siècles ces choses là étaient vues, comprises et maîtrisées. Ceux qui vinrent à l’époque de la Renaissance et plus tard ne verrons plus et comprendront de moins en moins jusqu’à ne plus rien comprendre du tout durant le 20e siècle.
Ainsi, les alchimistes actuels ne peuvent comprendre Albert le Grand ou Basile Valentin s’ils les lisent nanti des connaissances modernes. L’alchimie n’est pas une super-science, même si certains faits peuvent le laisser croire. Il faut aborder les auteurs anciens en sachant que pour eux ce spirituel était encore une réalité…Qu’ils voyaient ! Alors seulement on comprend comment ils emploient les mots, comment ils s’expriment.
Le chimiste Pierre Laszlo étudie, dans son livre Qu’est-ce que l’alchimie ? (éditions Hachettes, Paris 1996) les textes des alchimistes anciens et tente des interprétions à la lueur de la chimie actuelle. Et naturellement, vu de l’extérieur, expérimenté selon les méthodes actuelles dans un laboratoire de chimie moderne. Ce que dit, par exemple Basile Valentin, est jugé et interprété sans dissimuler une certaine superficialité frisant l’incohérence. Ce genre de conclusion est inévitable à moins de vouloir faire dire aux adeptes ce qu’ils n’ont pas dit ! Basile Valentin par exemple n’a pas dit qu’il décrivait les différentes transformations de la matière au contact du feu. En réalité ses textes sont parfois des fragments d’embryologie. C’est l’évolution de l’embryon sous l’action du feu interne de la mère. Cela est exprimé sous forme d’images et de termes déroutants comme la température du ventre du cheval, ce qui se traduit comme une température « cabalistique ».
Selon la manière de penser actuelle les scientifiques et les historiens ne peuvent qu’y voir une simple expérience de laboratoire. Évidemment cela ne tient pas la route et ne peut déboucher sur rien de consistant. Je dois souligner pour finir que ce livre de Pierre Laszlo ne manque pas d’intérêt sur d’autres plans, notamment sur l’étude des alchimistes à travers l’histoire et la philosophie hermétique de chaque période historique.
Il faut retenir que les interprétations de textes alchimiques pré-Renaissans sont délicates. Actuellement pour éviter de manquer des « aiguillages », et donc de mal interpréter, il est nécessaire de maîtriser la langue des alchimistes ou langue du cheval, langue verte ou encore langue des dieux, qui n’est autre que la Parole perdue des Francs-Maçons. N’avons-nous pas la preuve éclatante qu’elle est bel et bien perdue ?
Depuis la Renaissance jusqu’au XVIIIe siècle ces facettes multiples des textes furent de plus en plus voilées à notre entendement, pour l’être totalement au début de XIXe siècle. Et depuis environ deux siècles nous sommes dans une période d’obscurantisme total.
La conception moderne du monde a abouti à ceci : Imaginez qu’un homme soit en face de vous. Vous cessez de vous intéresser à lui, et vous ne gardez que ses vêtements que vous suspendez à un portemanteau dont le sommet aurait la forme d’une tête (on en trouve actuellement dans le commerce) et ainsi je néglige l’homme réel. Je me figure que cela, c’est l’homme !... Que m’importe que dans ces vêtements il ait pu y avoir quelque chose ? cela, ce portemanteau, c’est l’homme ! La même chose est arrivée avec la nature. Cela fait sourire que derrière la chaleur il y ait l’action de la hiérarchie des Chérubins ! Que derrière tout ce qui nous entoure se manifeste à notre insu l’action des hiérarchies célestes qui sont la clé des correspondances et analogies des sciences spirituelles. Sans elles ; inutile d’essayer de comprendre hermétisme et l’alchimie ! Foutaise, diront nos modernes cartésiens, tout ça ce ne sont que des histoires ridicules à dormir debout ! Rêve d’utopistes que ces infantilismes ! L’homme il est là tout entier sur ce portemanteau ! Il n’est pas plus que ces vêtements qui y sont suspendus. L’homme-portementeau, c’est l’homme tout entier. Nous sommes viandes et rien d’autre !
Cela c’est le premier acte !
Le deuxième acte commence avec les théories de Kant. Le Kantisme procède ainsi : devant les habits pendus au portemanteau on se met à philosopher sur ce que peut bien être la « chose en soi » de ces vêtements et on découvre que cette « chose en soi » des vêtements reste « inconnaissable ». Très ingénieux ! Vous ne trouvez pas ? Vous comprenez pourquoi Albert Einstein n’était pas dupe et disait non sans humour que chacun à son Kant à soi !
Quant on a d’abord supprimé l’homme et qu’on n’a plus devant soi qu’un portemanteau-viande que sont les vêtements, on peut toujours philosopher sur ceux-ci et échafauder des spéculations très élégantes. On peut dire à la manière de Kant : l’homme ne peut connaître la « chose en soi » ; ou bien que dans ces vêtements il n’y a que des atomes agglomérés qui leur donnent leurs formes. Bravo ! génial !
Hélas, oui ! voilà comment la pensée a évolué ! C’est une ombre de pensée aussi superficielle que les vêtements-viande sur le portemanteau ! Et pourtant c’est dans cette pensée, dans cette forme de spéculation que nous vivons aujourd’hui ! C’est à elle que nous empruntons notre conception scientifique de la nature.
Cela me rappelle une anecdote de ma vie estudiantine durant laquelle je suivais des cours communs avec les chirurgiens.
Dans un petit amphithéâtre ou nous étions peu nombreux, le prof, qui connaissait chacun de nous (il nous appelait par notre prénom) nous laissait souvent la parole pour des échanges fructueux.
Un jour nous nous interrogions sur des régulations physiologiques cardiaques en l’absence de circuit nerveux ou de sécrétions hormonales susceptible d’expliquer ce phénomène.
Un étudiant avança l’hypothèse de l’existence d’une régulation extra-physiologique actuellement inconnue. C’est cela qui mit le feu aux poudres ! Et l’amphi devint aussi turbulent qu’une séance houleuse au palais Bourbon.
Les chirurgiens cartésiens et ultra rationalistes s’opposèrent violemment à cette hypothèse car, pour eux, un mort clinique risquait de ne pas l’être. Le débat glissa donc sur l’autopsie. La majorité était contre prétextant un principe de précaution. Les chirurgiens étaient pour couper en rondelle, sans état d’âme, tout individu (le mot individu signifie indivisible je le rappelle) morts cliniquement. La bagarre faisait rage et le dialogue n’en était plus un. Aussi le prof demanda le silence en reprenant l’étymologie de l’autopsie et en soulignant le préfixe « auto » disant clairement que pour les anciens le mort se voyait disséqué.
Il s’adressa alors aux chirurgiens en leur demandant s’ils n’éprouverait rien de particulier en autopsient leur enfant. Il n’y eu pas de réponse et le débat fut clos mais les chirurgiens ne furent pas convaincus. Il faut reconnaître que rien de convainquant ne pouvait être avancé. Curieusement il y eut ensuite une animosité sous jacente entre physiologistes et chirurgiens car on devinait que ces derniers étaient partisans de l’homme-portementeau. Dans le cadre de cette histoire il faut remarquer qu’il existe fort heureusement des scientifiques qui entrevoient l’homme surnaturel. C’est pour cela que j’ai cru bon de vous raconter ce souvenir de jeunesse.
Oui, il faut réintroduire l’homme dans ses vêtements. Les premier frémissements en ce sens se manifestent dans les hopitaux par la lutte contre la douleur, la découverte de la dimension psychologique du cancer, les soins palliatifs, et plus généralement l’émergence de l’homme holistique et holoscopique.
Une chose est certaine la rénovation tend à comprendre l’homme entier corporel et extracorporel. C’est vers cela que s’oriente la science spirituelle. Ainsi redécouvrirons-nous concrètement l’action des hiérarchies spirituelles dans l’homme et dans notre monde sublunaire. Mais encore faut-il nous laisser guider par notre ange gardien !