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24 novembre 2012 6 24 /11 /novembre /2012 18:43

vierge d'alet

Plusieurs lectrices m’ont demandé des précisions sur  l’apparition de St-Bauzile-de-la-sylve. Je vais donc raconter l’essentiel de l’histoire. Ensuite je dirais ce que j’ai compris. Évidemment, il s’agit seulement d’une opinion qui vaut ce qu’elle vaut. Puis-je vous prier de ne pas faire de mon petit laïus une parole d’Évangile ?

C’était un dimanche, plus exactement le dimanche 8 juin 1873. Ce matin-là un homme descendait le chemin qui va du village de Saint-Bauzille-de-la-Sylve à Aumelas. Il s’appelait Auguste Arnaud ; il avait trente ans ; marié depuis six ans, il était père de deux enfants.

Catholique pratiquant, il respectait tous les préceptes de l’Église, sauf celui qui interdisait de travailler le dimanche... Il était parti de bonne heure pour aller « descaucelar », c’est-à-dire enlever les mauvaises herbes qui à cette période de l‘année tendaient à envahir les pieds de sa vigne, celle qui bordait le chemin à 700 mètres du village.

Ayant compris que le dimanche devait être réservé à l’office religieux, il avait l’intention de retourner vers 11 heures pour assister à la messe.

Donc, s’il travaillait ainsi le dimanche, c’est parce que, engagé toute la semaine au service d’un patron, il n’avait guère que ce jour pour s’occuper de ses quelques lopins de terre et ainsi pouvoir fabriquer son vin de table et vendre quelques hectolitres d’excellente qualité pour subvenir aux besoins de sa famille.

C’était un travail harassant, où la vie s’usait vite sous l’érosion du soleil, du froid et de la pluie. Le dimanche était nécessaire puisque les jours de pluie étaient chômés. Nous étions en un siècle ou 60% de la population était analphabète et ou le droit du travail somnolait dans les limbes de son devenir.

En ce début juin la poussée vitale du printemps faisait se développer le pampre et le raisin en fleur exhalait son effluve de vie. Arnaud aimait la terre avec cette simplicité profonde des laboureurs qui savent compenser leur ignorance culturelle par leur connaissance intuitive de la culture. Il savait que les pousses printanières étaient à l’heure cette année et lourdement chargées de promesses, signe d’une excellente santé.

Cette belle santé des ceps était vraiment exceptionnelle en ce moment ou le phylloxéra faisait des ravages terribles en tuant inexorablement les vignes. Et ce fléau était là, derrière les collines. De tous côtés on scrutait avec anxiété l’avance inexorable du désert.

Car en cette année 1873 Le vignoble de Lunel était anéanti, et l’insecte parasite avait totalement détruit le vignoble de 78 communes de l’arrondissement de Montpellier.

Ce fut la ruine de multiples propriétaires. Arnaud avait toutes les raisons de bichonner sa vigne un dimanche avec cette sollicitude  propre aux soins « palliatifs » accompagnant une vie, encore vigoureuse, mais qui doucement s’éteint. Pour un homme de la terre voir mourir une plante estimée et soignée avec sollicitude pendant des années c’est voir disparaître un enfant affectionné.

Il faut dire que le salaire de misère d’Arnaud était insuffisant pour que puisse vivre sa famille. Aussi la belle récolte de sa vigne lui aurait assuré le pain pour toute sa famille… alors le dimanche était secondaire façe à cette nécessité vitale. C’est en pensant à cela que Arnaud ce mit au travail ce matin là. Il travailla deux heures environ, puis fit une pause pour un casse-croûte et un peu de repos. Comme la chaleur commençait à être fatigante il se mit à l’ombre d’une petite plantation d’oliviers dont il reste encore un bosquet de aux troncs énormes et tortueux, pratiquement millénaires, ayant miraculeusement échappé au terrible hiver de 1956.

Il bourra sa pipe et s’apprêtait à l’allumer pour prendre un moment de repos en rêvassant aux fruits de sa belle récolte.  C’est à ce moment là qu’il vit apparaitre devant lui un personnage sous la forme d’une femme de taille ordinaire toute vêtue de blanc. Elle portait une ceinture frangée, sa tête était coiffée d’une couronne haute, semblable à une mitre d’évêque. Un grand voile blanc, partant du sommet de la couronne, l’enveloppait de toute part jusqu’aux pieds, couvrant même ses mains que le personnage tenait croisées sur sa poitrine. Tous ces divers ornements étaientd’une éclatante blancheur. La figure de cette femme était belle, calme, sans exprimer ni joie, ni tristesse. Elle ne souriait pas et paraissait avoir 25 à 28 ans et était noyée dans une atmosphère lumineuse.

Quand il la vit à deux ou trois mètres de lui, Arnaud stupéfait bondit du talus herbeux sur lequel il était assis et lui adressa la parole en occitan couramment parlé dans le village :

 « Qué dès vos ? » : Qui êtes-vous ?

Elle a répondu dans la même langue :

« Soi la Santa Vèrge » : Je suis la Sainte Vierge.

« N’agès pas paur » : N’ayez pas peur.

Arnaud fut immédiatement rassuré et son émotion fut à son comble. Il ne comprenais pas la raison de sa présence et la réponse lui fut donné sous la forme d’une constatation évidente et pourtant significative :

« Abès la malautia de la vinha » : Vous avez la maladie de la vigne.

Il est évident que cette constatation banale, et connue de tous, n’a aucune raison d’être signalée. On ne peut supposer que c’est  parler pour ne rien dire à moins de prendre notre apparition pour une disciple de Lapalisse. Si on donne un sens figuré à cette remarque, elle prend alors un singulier relief et devient très pertinente. En effet, le phylloxéra doit sa redoutable efficacité destructrice au fait que cet insecte (Daktulosphaira vitifoliae), ou phylloxéra de la vigne) s’attaque aux racines et tue les souches inexorablement. De ce fait dire : « Vous avez la maladie de la vigne », signifie que vous aussi, Hommes, vous avez la maladie de la vigne. C’est affirmer que l’humanité est atteinte d’un mal mortel dans ses racines. C’est une véritable prophétie puisque autant le phylloxéré que le mal de nos racines n’a pas disparu. En effet, dans les années 1970 le vignoble californien est attaqué par une forme mutante (biotype B) et en 1980 la Turquie est atteinte (région de Tokat). Dernière attaque en ma connaissance en Australie (2006) dans l’État de Victoria. Il semble évident que ce fléau est à l’image de notre société dont les racines sont pourries.

En d’autres termes, les principes de base sur lesquels reposent nos systèmes financiers économiques et moraux ne peuvent nous conduire qu’au désastre. Et la pourriture de nos racines gagne l’Europe entière jusqu’à sa destruction dans d’effroyables drames psychologiques (suicides liés à une organisation du travail totalement inhumaine) et humanitaires : migrations, bidonvilles, famines... La réponse au racket (impôts déments) légitimé par l’État ne peut que produire des vols, des rackets, et des assassinats… plus la haute société est rapace plus le bas de cette même société le sera… à sa manière évidemment.

Si mon interprétation ne vous sied pas, il vous reste à dire que le brave Arnaud à été victime d’un épisode hallucinatoire ou d’un délire mystique. Malheureusement, personne ne sait ce qu’est une hallucination, pas même les pontes de l’académie de médecine. Les choses deviennent surréalistes quand une hallucination donne rendez-vous dans un mois pour une autre hallucination, ce fut le cas d’Arnaud :

« Dins un mes bendrai vos remerciar » : Dans un mois je viendrais vous remercier.

Nous étions le 8 juin, Rendez-vous fut pris pour le 8 juillet !

Heureusement qu’il existe un critère, assez fidèle, pour savoir si le phénomène est maladif. Dans le cas d’une pathologie mentale le phénomène est vécu dans le mal-être ou la souffrance. Ce ne fut pas le cas pour Arnaud qui retourna chez lui tout ému et heureux le cœur illuminé de bonheur et d’un amour joyeux dont il ignorait la puissance, et même l’existence, jusqu’alors.

Voulant éveiller la foule à la dimension spirituelle, la Vierge demanda ensuite à Arnaud des offices religieux et processions et aussi de dresser des croix à des endroits particuliers. Puérilité ? Non car la prière est un puissant levier pour changer bien des choses dans le monde, dans les racines du monde, même une prière « non religieuse », c'est-à-dire une demande VRAIE, issue des profondeurs du cœur. Ce genre de prière n’a point besoin d’être dictée ou canalisée par un autorité religieuse et encore moins définie par elle. L’oraison dite « jaculatoire » dit bien ce qu’elle veut dire… Ce terme « jaculatoire » vient du mot latin "jaculum" qui veut dire flèche, javelot. C'est une prière très brève, un cri du cœur qui s'élance vers Dieu. Le reste est de la foutaise.

Voici donc Arnaud dans sa vigne le mardi 8 juillet. Il travaille toujours à « déchausseler », travail ardu, fatiguant, car plié jusqu’au sol, la tête dans les sarments avec la poussière concentrée sous les sarments et la chaleur qui provoque une intense transpiration du visage, il faut se relever périodiquement pour prendre une « bocada d’aire » ou une « bouchée » de bon d’air.

C’est au moment de cette « boucada » qu’il est droit, la tête levée, les yeux grandement ouvert, fixé vers le haut. Sa main droite saisit son chapeau et le jette à terre. En même temps ses bras s’élèvent, son visage est pâle, très pâle, ses mains paraissent démesurées allongées (rapports de témoins) ses yeux grandement ouverts n’éprouvent aucun mouvement de paupières ; ils sont fixés sur un objet qui l’attire.

Pendant un court instant il se balance sur lui-même, et puis tout à coup il est emporté avec une rapidité foudroyante (concordance de tous les témoignages) vers la croix.

Pour tous les paysans familiers de la terre qui savent combien il est malaisé de circuler dans une vigne à cette époque de l’année, cette course leur est apparue humainement inexplicable car Arnaud ne regardait pas à terre qu’il ne pouvait voir puisque recouverte par le feuillage. Ors, il n’a pas trébuché, il n’a pas sauté, il semblait « nager » disent les témoins. Pour lui poins d’obstacles, le corps paraissait être porté plus qu’avancer par ses propres moyens.

Pour les vignerons présents, un homme parcourant le même chemin en regardant en l’air, et tentant de se déplace à travers les sarments entrelacés n’aurait pu faire trois pas sans tomber ou sans s’embarrasser ses pieds dans la vigne et les mottes de terre.

Quant à Arnaud, interrogé pour savoir si ses pieds ne furent pasembarassés pendant cette marche rapide Il répond qu’il n’a rien vu car il était absorbé par l’Apparition qui était la même jeune femme que la première fois avec des vêtements de forme similaires mais lacouleur était d’or avec une atmosphère lumineuse de quelque centimètres de large. Sa figure était pleine de clarté, les mains croisés sur le poitrine et sous le voile, étaient entourées d’un chapelet toujours de couleur or. »

L’apparition se plaça à l’extrémité supérieure de la croix et dit à Auguste :

« Cal pas trabalhar lou dimenge » : Il ne faut pas travailler le dimanche.

Elle fit glisser le chapelet sur la main gauche et, de sa main droite, elle donna la bénédiction à la foule.

« Que canto dé cantica » : Qu’elle chante des cantiques.

Et elle disparut.

Alors la foule présente se mit à chanter spontanément le magnificat (on prononce le t final) qui est le cantique chanté par la Vierge Marie après l’Annonciation lors de la visite qu’elle rend à sa cousine Élisabeth. Ce chant est aussi appelé Cantique de Marie, il fut tiré de l’évangile selon Luc (chapitre 1, versets 46 à 56)

Deux messages a l’apparente banalité laisse perplexe au premier abord.

Pourtant, le fait de ne point travailler le dimanche est étroitement lié à la décomposition des racines de notre société. Actuellement, ce repos dominical tend à ne plus être respecté 

Ce cycle septénaire de la vie (par exemple renouvellement de nos cellules tous les sept ans) et de la matière (comme les sept niveaux énergétiques de l’atome, sur lesquels gravitent les électrons) ce cycle donc (si souvent signalé dans la Bible) a donc son importance autant sur le plan physique que sur l’impérieuse nécessité de réharmoniser notre manière d’être et de méditer en harmonie avec les lois fondamentales de l’univers. Cela des auteurs tel Rudolf Steiner l’ont très bien mis en évidence.

Le deuxième point est la nécessité de chanter. Là encore la banalité est désarmante… une apparition pour dire ; « chantez » ! n’est pas sérieuse direz-vous. Et pourtant c’est extrêmement important, que dis-je c’est capital pour développer la spiritualité et la vie mystique.

Les neurosciences ont découvert que le fait de chanter avait la particularité de stimuler la même partie du cerveau que celles responsables de la vie mystique.

Comme au XIXeme siècle on ignorait ces choses là, les apparitions furent classées sans suite, et pourtant elles sont supérieures à celles de Lourdes car elle s’inscrivent dans notre actuel.

Les hermétistes auront goûté la couleur blanche de l’apparition, qui deviendra dorée un mois après.

Enfin, n’oublions pas l’étrange extase d’Arnaud qui n’a plus fait partie du domaine terrestre lorsqu’il s’est joué des obstacles et s’est déplacé à une vitesse foudroyante. Cette extase mystique fut la même que celle des soufis, des moines chrétiens des bouddhistes ou zen des anachorètes et des derviches. Et pourtant Arnaud était un paysan… conclusion ? La vie mystique est à la portée de tous ceux qui ont une vie professionnelle… Ne la croyons pas réservée aux moines.

Je voudrais souligner un petit fait qui caractérise notre société bavarde : Parler d’extase n’est pas l’extase. Rien de commun avec   l’ivresse du papotage !

Avec toute mon amitié.

 

 

Ce terme occitan « descaucelar » exprime le fait de déchausser autant un pied humain en lui enlevant son soulier qu’un pied de vigne en lui enlevant les mauvaises herbes. Dans les campagnes méridionales ce terme est couramment francisé (sans être pour cela dans le snobinard petit Larousse des rats de villes) sous l’expression « déchausseler ».

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