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eaucoup de chrétiens affirment péremptoirement qu’il faut distinguer les sectes de leur religion ! Et cependant… il est impossible de différencier clairement les sectes des religions.
En notre triste monde sublunaire il est une sorte de lutte chauvine et insensée cherchant absolument une élévation glorieuse de notre opinion religieuse bien personnelle pour la couronner, aux yeux du monde entier, comme l’unique et inaltérable vérité.
Vacuité du monde sous les herbes folles qui s’enracinent avidement dans le terreau spirituel pour tenter de tout drainer vers leurs ego collectifs intolérants et surdimensionnés. Ah les orgueilleuses Eglises phare de la chrétienté en réalité falote noctiluque bien incapable d’éclaire. Mais ne nous égarons pas dans l’obscurité des méandres théologiques ou dans les caves obscures et puantes de l’inquisition.
Précisons avec fermeté, et soulignons trois fois, que malgré les bonnes volontés quelque peu rageuses, face à leur vacuité, les pouvoirs civils comme religieux, sont incapables de donner une définition précise de la secte.
Non ! Et n’en déplaise aux sectes anti sectaire fanfaronnes et quelque peu liberticides, porte parole des pouvoirs muselés mais désireux de mordre rageusement, il n’y a pas de définition césarienne de la secte. Cependant… Si ! il y en est une de surréaliste et abondement adoptée. Elle nous est livrée d’une manière quelque peu impudente et lapidaire par Odon Vallet :
« On est secte quand on ne vous aime pas, on est religion quand on vous admet. »
Le professeur des Religions (Sorbonne) Odon Vallet nous parle joliment du sens à accorder au terme « secte ». Les cabalistes ne pourront qu’apprécier :
« Car il n’y a pas de définition précise de la secte. Le mot a lui-même a une origine complexe. Il est issu du verbe latin sequi (suivre) mais il a été influencé par le latin secare (couper). Entre le sectateur qui suit son chef et le sécateur qui coupe la plante, le différence de son est minime et l’écart de sens réduit. Car suivre aveuglément un chef, c’est aussi se retrancher du monde ; suivre obstinément une ligne de conduite, c’est se couper du bon sens. » In Petit lexique des idées fausses sur les religions p 220, Editions Albin Michel, 2002.
Le disciple d’une secte emprunte donc une voie qui fera de lui un adepte, quelqu’un qui a atteint le but (adeptus = ayant atteint). Il « suit » un maitre ; en même temps, il se coupe du reste de la communauté humaine… Evidemment cet aspect développé par le psychiatre Jean-Marie Abgrall (in La Mécanique des sectes, Editions Payot 1996) reste aléatoire. En effet comment qualifier les adeptes du Christ et de Bouddha ?
Une religion est, comme l’on dit souvent et à juste titre, une secte qui a réussi. C’est un groupuscule devenu grand, un carré de fidèles transformé en légion et rebaptisée Eglise. Ne nous y trompons pas, l’aspect numérique ne définit pas l’appellation d’Eglise. Ce qui détermine ce terme c’est beaucoup plus la dimension mystique, initiatique et pédagogique de l’assise « doctrinale » laquelle repose sur la responsabilité lucide de chacun et non sur des règlements ou dogmes contraignants.
Le Nouveau Testament parle de la secte de Jésus (Actes des Apôtres 24, 5 et 14 ; 28, 22) car le Christ avait pris la tête d’une dissidence, très minoritaire dans le judaïsme. Celle-ci était une « hérésie » (hairèsis), c’est-à-dire un choix contesté, une doctrine minoritaire.
Donc, ne l’oublions pas, le christianisme est, à son origine, un groupuscule sectaire d’hérétiques.
De même parle-t-on souvent des multiples « sectes » du bouddhisme qui sont plutôt des écoles de pensée, des groupements spirituels, des « véhicules » (yana) de progression morale. En ce sens, une religion peut être une somme de « sectes » qui ne sont pas sectaires, sinon pour leurs adversaires.
Les grandes sectes ou Eglises, surtout là Catholique, ne reconnaissent pas les petites Eglises, ou écoles de pensées, et voudrait que le sectarisme dangereux se définisse à partit d’un trop petit nombre de pratiquants afin de faire condamner ces « hérétiques » qui entravent leur suprématie.
Quand le christianisme fut en proie aux grandes controverses doctrinales sur la nature d Christ (IVe et Ve siècle), chaque opinion fut tour à tour orthodoxe et hérétique, officielle et sectaire.
Ainsi, l’Empereur Constantin, convoqua en 325 le Concile de Nicée. Voulant supprimer les évêques « Ariens », il expulsa 1730 évêques « Ariens » sur les 2048 qui se présentèrent, avec leurs femmes et leurs enfants (sic). Après les décisions de 318 évêques seulement les 1730 exclus durent signer les conclusions du concile sous peine d’exil. Dans les conciles suivants ce furent, à l’inverse, les non Ariens qui figurèrent parmi les expulsées… Ainsi va la balle de ping pong durant tous les conciles dits christologique, cherchant qui condamner ou non en fonction des pouvoirs politiques ou... de l’air du temps.
Dans cette lutte idéologique, les sectes prospérèrent sur l’irrationnel et l’indémontrable. Selon la formule de Voltaire, « Il n’y a point de sectes en géométrie : on ne dit point un euclidien, un archimédien. Quant la vérité est évidente, il est impossible qu’il s’élève des parties et des factions. Jamais on n’a discuté s’il fait jour à midi » (Dictionnaire philosophique).
Mais on a « disputé » (comme à l’occasion du concile de Nicée) pour savoir si le Fils était semblable ou identique au Père, car les Evangiles sont loin d’être explicites à ce propos et prêtent bien à controverse quant on veut que le Fils soit en communion et consubstantiel au Père alors qu’il déclare lui-même à propos du moment ou surviendra la fin du monde :
« Pour ce qui est du jour et de l’heure, personne ne le sait, ni les anges des cieux, ni le Fils, mais le Père seul » (Matthieu, 24, 36)
Donc, dirent les « Ariens », dans une logique que seul les rhétoriciens fallacieux détournent : Si le Christ ignore ce que mijote le Père, ils ne sont pas pareil… ce qui ne veut absolument pas dire que le Fils ne partage pas la divinité du Père. Telle était la théologie des Wisigots méridionaux.
Et c’est ainsi que les « Arien » furent accusés de nier la divinité du Christ et que Rome mandata un roitelet Belge à sa solde, alias Clovis, pour nettoyer le midi « arien » de la Gaule et le couronner Roi… Ce fut la première « croisade » contre des hérétiques Languedociens. Pays trop « libertaire » aux yeux des moralistes et formalistes venant du froid et de l’orgueilleuse Rome, ou la sanguine impériale se confond avec la charité chrétienne.
Pour distinguer une secte d’une religion, on a essayé le critère du nombre qui ferait d’une secte une religion de poche. En fin de compte si vos idées sont originales ou marginale vous pouvez être une secte à vous seul ! Heureusement que le ridicule ne tue pas.
Cependant il est vrai que la plupart des sectes ont du mal à prospérer à cause de leur intransigeance et que les grandes religions sont d’anciennes sectes qui ont accepté des compromis. Si une Eglise chrétienne exigeait de ses membres qu’ils suivent à la lettre l’ordre du Christ : « Viens, quitte tout et suis-moi », ce suivisme aveugle serait sectaire.
Ces compromis des Grandes Eglise ont engendré une certaine paresse chez les chrétiens. De ce fait si une petite Eglise à forte connotation ésotérique (sans pour cela être secrète) propose un effort en toute liberté, il est refusé ou noyé dans un verbiage inactif et les chrétiens préfèrent la quiétude du grand lit à roulette de plus en plus rembourré (pour les conduire jusqu’au ciel) que leur présentent les idéologues religieux (« cathocrates », disent les mauvaises langues en parlant des théologiens ). Ce genre d’attitude est évidemment de plus en plus étranger au christianisme. Tel est le replâtrage des somptueux textes éternels trépassés sous leur blanc linceul.
Or, le suivisme aveugle est aujourd’hui exigé par certains organismes extérieurs aux grandes religions comme par d’autres qui leur sont liées telles ces communautés nouvelles du catholicisme qui ne diffèrent en rien d’une secte par leurs règles extrêmes. Combien les désertent la déception au cœur après avoir gâchées leurs jeunes années. Une de mes amies m’a confié sa profonde déception après avoir été participante enthousiaste de la communauté de Notre Dame de Vie. Aujourd’hui, désemparée elle vit en couple dans une marginalité effrayante… avec un conditionnement si tenace qu’elle est incapable d’envisager un autre christianisme que celui qui lui a lavé le cerveau. De ces naufrages nul n’en parle car trop liés aux grandes Eglises dont le pouvoir permet une certaine dissimulation…
Le courant de Notre-Dame de Vie (dont la dimension alchimique n’aurait du échapper à personne) comme celui des communautés similaires se rattache à une philosophie chrétienne pervertie et cependant non séparée du catholicisme qui de ce fait a d’importantes connotations sectaires dont le catéchisme actuel reste un perpétuel opprobre par la manière abstraite de sa rédaction. Les 676 pages du Cathéchisme de l’Eglise Catholique (Editions Mame et Plon 1992) sont un monument d’abstraction qui escamote les problèmes de fond rebutant les mieux intentionnés. Moralisme sans dimension suprasensible mais éveillant la sensiblerie comme les réseaux soucieux en témoignent.
Mais il est aussi des courants qui relèvent d’un syncrétisme inclassable. On peu fonder une secte néo-hindouiste en se réclamant de Krishna ou inaugurer un syncrétisme universel en se présentant comme le « Messies cosmo-planétaire », mais dans ces deux cas, ces créations sont distinctes des grandes religions traditionnelles.
Il n’en est pas de même avec certains mouvements charismatiques apparus au sein du catholicisme ou du protestantisme, souvent (comme Notre Dame de Vie) avec l’accord de la hiérarchie des Eglises. Certaines communautés nouvelles appliquent les recettes éprouvées de l’abus de pouvoir et de la manipulation mentale en pervertissant les règles des grands ordres religieux. Comment distinguer sûrement un dominicain sectaire d’un dominicain conciliaire aux idées ouvertes ? La multitude des congrégations (dans le catholicisme) et des Eglises (dans le protestantisme) favorise la confusion. Ajoutons à cela la prolifération des petites Eglises chrétiennes dont la tolérance n’est pas toujours au rendez-vous. Généralement elles sont traditionnalistes avec une tendance à refuser le sacerdoce féminin. Souvent elles ne font qu’imiter l’Eglise Catholique et ne présentent aucun danger sectaire sauf d’avoir érigé la croyance en lieu et place de la connaissance. Il y a aussi quelques Eglises alchimique libérales difficile à apprécier comme les Eglises gnostiques. Dans le lot se trouvent de gais lurons qui, sous les caméras de télévision, grimpent sur les femmes pour les exorciser. Bref un salmigondis généralement peu dangereux avec de gentils fumistes.
Des critères de discernement ont été proposés par une commission d’enquête parlementaire sur les sectes, en relation avec les enquête quelque peu suggestive des anciens Renseignements Généraux qui n’ont pu condamner l’Anthroposophie, crée en 1913 par Rudolph Steiner, car le juge a tiré les oreilles des espions des R.G. qui colportait des calomnies. Devant leur impuissance ils ont classé rageusement l’Anthroposophie dans les sectes qui pourraient être dangereuses. Vous l’avez compris nous sommes en plein jeux de pouvoirs et de recherche de destruction massive. Cela est confirme car « la secte qui a réussi » propose par la voie de Mgr Vernette, des critères qui ont pour seul but d’exonérer l’Eglises catholique de toutes suspicions. Personne ne peut, mystiquement parlant, définir une secte. Et bien les tribunaux l’on fait lors d’un jugement de la Scientologie diffusé au journal télévisé. L’expert auprès du tribunal a dit que l’Eglise de scientologie n’était pas une Eglise. Tout aurait pu être crédible si cette opinion émanait d’un historien des religions, d’un psychologue ou encore d’un sociologue. En réalité cet expert était un prêtre catholique, ce qui m’a fait bondir de ma chaise et pourtant je n’aime pas la scientologie, mais là c’est le pompon d’une manipulation… Une grosse secte qui juge une petite, une chrétienne qui juge une non chrétienne, c’est effarant, surréaliste. C’est du guignol mal attifé. Les magouilleurs, devrait être plus discret !
Donc, aucun spécialiste sérieux des sectes ne retient comme critère le petit nombre des adeptes (les zoroastriens sont à peine cent mille dans le monde mais sont les ultimes représentants d’une grande religion), ni la nouveauté du mouvement (le caodaïsme vietnamien n’a pas cent ans mais n’est surement pas une secte, pas plus que l’Eglise Libérale des Anglo-Saxons). Pour compliquer le tout, il ne peut exister, en droit français, aucune définition d’une religion et, donc, d’une secte. En effet, selon l’article 2 de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation de l’Eglise et de l’Etat, « La république ne reconnaît aucun culte ».
Et elle ne reconnaissait aucun religieux sous la Révolution. L’article 12 de la Constitution du 5 fructidor an III (22 août 1795) comme l’article 6 du titre 2 de la Constitution du 3 septembre 1791 précisent que la qualité de citoyen se perd par « l’affiliation à une corporation étrangère qui exigerait des vœux religieux ». Entre le vœu et le vote il fallait choisir et l’obéissance à une règle de vie était jugée aliénante, le père abbé ou la mère abbesse apparaissaient aussi illégitime que le gourou d’une secte. La confession la plus répandue au monde, l’Eglise catholique, était alors tenue pour aussi nuisible aux libertés qu’un groupuscule sectaires.
Raisonnablement on ne peut distinguer une religion d’une secte. La question que vous devez vous poser est : pourquoi cet article ? J’ai voulu dire que chacun est libre de choisir sa religion et dans ce choix le rapport parlementaire des sectes est illégitime et même pas digne de confiance donc nul et non avenu. Il est fait pour influencer d’une manière illégale les individus crédules et apeurés et les diriger vers le giron protecteur des grandes religions.
Un de mes amis que j’ai connu sur les bancs de la Fac à achevé une brillante carrière professionnelle dans une opulence certaine. Je lui ai demandé s’il avait poursuivi ses recherches dans l’ésotérisme et en particulier l’alchimie. Il m’avoua avoir abandonné tout cela car c’était dangereux pour sa vie professionnelle… ais-je raison de verser une larme ?
Avec toute mon amitié.